"C'est impossible aujourd'hui de trouver un appart à Milan": les ...

Alors qu'en France les menaces de hausses d'impôts sur les contribuables aisés se multiplient, l'Italie reste un pays bien plus attractif pour les hauts revenus. Si des nombreux riches Français s'y interéssent, très peu ont pour l'heure franchi le pas.

Direction l'Italie pour les Français aisé ? Dans un contexte de flou politique et de grande incertitude fiscale, l'idée pourrait faire de plus en plus son chemin chez les contribuables qui craignent de faire les frais des hausse d'impôts qui semblent se dessiner. Et ce n'est pas cet éventuel projet de taxe sur les gros patrimoines dans les cartons de Bercy qui devrait les rassurer.

"On va s'attaquer à la catégorie de personnes qui a le plus de facilité à défiscaliser et à quitter la France, estime sur BFM Business Marc Fiorentino, associé gérant d'Euroland Corporate. Ça va faire les affaires de l'Italie."

"C'est déjà le cas: n'essayez pas de trouver un appartement à Milan c'est impossible. Les Français veulent tous y aller, les avocats fiscalistes sont débordés."

Après la Belgique, le Luxembourg ou le Portugal, le nouvel eldorado des grandes fortunes française désireuses d'échapper au "matraquage fiscal" serait-il de l'autre côté des Alpes?

Un régime fiscal favorable aux plus aisés

Il est vrai que l'Italie a fait de gros efforts ces dernières années pour attirer ou faire revenir des contribuables aisés. Le pays a mis en place un impôt forfaitaire appelé "flat taxe des Picsou".

"C'est un régime de faveur pour les gros contribuables, explique Jérôme Barré, avocat expert en fiscalité patrimoniale chez Yards. Vous payez 200.000 euros plus éventuellement 25.000 par membre du foyer mais vous ne payez que ça sur tous vos revenus."

Pour les foyers qui ont d'importants revenus supérieurs à 500.000 euros par an, ce régime fiscal est bien plus favorable que l'impôt sur le revenu progressif français.

De plus, pour attirer les "cerveaux" (chercheurs et professionnels hautement qualifiés), les étrangers qui transfèrent leur résidence fiscale en Italie ont droit pendant cinq ans à un abattement de 50 à 60% sur les revenus imposables.

Enfin, le régime fiscal en matière de donation y est lui aussi bien plus avantageux que dans l'Hexagone puisque les transmissions inférieures à 1 million d'euros sont exonérées et taxées à 4% au-delà. En France, l'abattement n'est que jusqu'à 100.000 euros et au-delà c'est un impôt progressif qui grimpe jusqu'à 45%.

"Les prix explosent à Milan et à Rome"

Bref, malgré des comptes publics eux aussi dans le rouge, l'Italie continue de faire les yeux doux aux riches contribuables étrangers. "Les prix explosent à Milan et à Rome où on peut encore acheter des petits hôtels particuliers à des prix bien plus bas qu'à Paris, confirme Jérôme Barré.

"À Milan ça va plutôt être des entrepreneurs. C'est une ville agréable, plutôt petite mais avec beaucoup d'activité et trois aéroports."

Les Milanais peinent d'ailleurs de plus en plus à se loger dans une cité qui devient pour beaucoup inabordable. Le prix du m² a atteint les 5.500 euros fin 2024, soit 38% de plus qu'en 2018. Milan est désormais bien plus chère que des villes françaises comme Lyon ou Nice.

"Dans la ville, il y a moins de 30.000 ventes immobilières par an. Quelques milliers d'acheteurs supplémentaires, riches et très motivés par les concessions [fiscales], suffisent à influencer significativement le marché", explique l'écricain italien Vincenzo Latronico dans un article d'Internazionale.

La tentation de Milan

Pour autant est-ce que ce sont les Français aisés qui font réellement grimper les prix à Milan? Pas vraiment, selon Corinne Lecocq, avocate associée chez Oratio.

"Les clients nous posent beaucoup de questions mais je ne peux pas dire qu'il y a des transferts massifs de la France vers l'Italie. Il y a plus une forme d'attentisme pour le moment."

Actuellement ce serait plutôt les investisseurs internationaux et notamment américains qui feraient grimper les prix en Italie, selon les experts du secteur.

De plus, jusqu'à présent, le régime fiscal français reste plus favorable pour les riches contribuables qu'il y a quelques années. Suppression de l'ISF ou encore "flat tax" sur les revenus du capital restent, pour l'heure, toujours en vigueur. Si ces mesures sont menacées, elles n'ont pas encore disparu.

Enfin ce n'est pas toujours si facile de partir s'installer à l'étranger. "Les gens qui ont les moyens ont peut-être une vision plus internationale de la vie mais c'est un vrai changement qu'on ne fait pas en 5 minutes, indique Corinne Lecocq. Il y a des contraintes de type médical, le fait qu'on ne veuille pas s'éloigner de son médecin, de son hôpital… Les gens se disent par exemple: 'je veux m'en aller mais j'aimerais bénéficier de la Sécurité sociale française', etc."

Pour l'heure ce sont plutôt des liens de business qui sont recherchés. "Je vois beaucoup d'entrepreneurs qui veulent développer leur activité à Milan mais sur l'expatriation il y a plus de questions que de déplacements réels", confirme Jérôme Barré.

"On attend de voir ce que ça va donner. Mais ce qui est sûr c'est que plus il y aura de hausses d'impôts, plus il y aura de départs."

La tentation de Milan existe mais la traversée des Alpes prendra encore un peu de temps.