Football: endetté, le FC Schaffhouse est au bord de la faillite
Publié4. décembre 2024, 15:10
Football: Endetté jusqu’au cou, le FC Schaffhouse est au bord de la faillite
Le club schaffhousois est menacé de déposer le bilan dès cet hiver. Son président, Jimmy Berisha, a tiré la sonnette d’alarme et chasse la moindre économie.
Stade Lausanne Ouchy a eu l’impression de bien s’être fait avoir. Alors qu’ils avaient effectué les quelque 260 kilomètres et cinq heures de bus pour se rendre à Schaffhouse, les Lions ont appris à 1h30 du coup d’envoi que le match de la 15e journée de Challenge League qu’ils devaient disputer le vendredi 22 novembre était reporté. La cause? Le terrain de la FCS Arena, jugé impraticable par l’arbitre suite aux chutes de neige. Le directeur sportif du SLO, Yagan Hiraç, estime que le club hôte n’a pas fait le nécessaire pour permettre à la rencontre d’avoir lieu. «Ne peuvent-ils pas payer quelqu’un pour déblayer le terrain? Manquent-ils de personnel? C’est ce que j’entends», avait-il pesté à chaud auprès du «Blick».
Ses interrogations étaient alors nourries par la sortie médiatique, peu avant, du président du FC Schaffhouse sur les ondes de la radio locale «Radio Munot». Jimmy Berisha avait dressé un constat alarmant sur la situation économique de son club. «Le FC Schaffhouse ne va pas bien. Nous avons besoin d’aide, c’est la seule façon de survivre. Nous n’y arriverons plus seuls», indiquait-il, ajoutant que le dépôt de bilan était une hypothèse crédible. Contacté par nos soins pour s’épancher sur les difficultés financières du FCS, l’ancien agent n’a pas donné suite à notre approche.
Ruiné par l'exploitation du stade
Il s’est en revanche montré plus loquace avec les médias alémaniques. Dans les colonnes de «Blick», Jimmy Berisha évoque des dettes à hauteur de plusieurs dizaines de millions de francs. L’urgence est telle que le club pourrait disparaître du monde professionnel dès cet hiver.
Le FC Schaffhouse est accablé par des dettes accumulées sous l’ère Roland Klein - propriétaire depuis 2019 - et l’exploitation de son stade, la FCS Arena, sortie de terre en 2017 avec une capacité de 8200 places. Une charge qui représente jusqu’à 1,3 million de francs par an, d’après «Radio Munot». Construite dans l’idée de pérenniser l’avenir du FC Schaffhouse au plus haut niveau, l’enceinte est en réalité en train de le tuer à petit feu.
Le mirage d'un investissement saoudien
En poste depuis maintenant un an, Jimmy Berisha cherche par tous les moyens à combler le déficit. Voilà plusieurs mois qu’il essaye de vendre la FCS Arena et prospecte à l’étranger en quête d’investisseurs. Une démarche qui avait abouti à un vrai-faux accord conclu en mars dernier avec un prince d’Arabie saoudite, censé entrer au capital. Une promesse restée sans lendemain et qui prête aujourd’hui à sourire.
En attendant la venue de plus en plus illusoire d’un messie, la direction réduit autant que possible le train de vie du club. Cela va des salaires de l’effectif - oscillant entre 700 et 4000 francs mensuels selon «Radio Munot» - à la quantité d’eau chaude utilisée à la FCS Arena.
L'ambitieuse politique sportive a vécu
Une descente aux enfers vertigineuse pour une institution qui avait lancé une ambitieuse politique sportive suite à la prise de pouvoir de Jimmy Berisha. Admir Mehmedi s’était installé au poste de directeur sportif, initiant un recrutement marqué par les arrivées d’éléments confirmés comme Raul Bobadilla et Ermir Lenjani. L’ancien international suisse Eren Derdiyok avait, lui, raccroché les crampons pour intégrer le staff technique.
À l’exception de Lenjani, tous ont quitté le navire à l’intersaison, sacrifiés sur l’autel des économies. «On nous a dit qu’on coûtait trop cher, alors que personne ne touchait plus de 4000 francs par mois», raconte sous couvert d'anonymat un joueur qui appartenait à l'effectif de la saison dernière.
Joint par téléphone, cet interlocuteur a été directement impacté par les problèmes pécuniaires du FC Schaffhouse. Comme d’autres, il a déchanté devant la réalité de l’organisation où il a mis les pieds. «Dès le premier salaire, c’était une galère, témoigne-t-il. Il a fallu trouver un arrangement pour que je sois rémunéré. J’ai accepté de gagner moins et en échange, on me promettait un poste dans le club en fin de saison. Mais j’ai très vite réalisé que ça n’allait pas se dérouler ainsi.»
Des joueurs désabusés
Difficile, dans ces conditions, de donner le meilleur sur le terrain. «On n'avait droit à aucune explication sur la situation, déplore le joueur anonyme. Les dirigeants nous disaient de rester concentrés sur le sportif, que le volet financier était de leur ressort et que cela allait s’arranger.» Un discours martelé durant l’épisode saoudien. «Ils s’en sont servi pour nous faire croire que tous les problèmes seraient réglés à terme, que chacun d’entre nous serait indemnisé à hauteur des sommes sur lesquelles on s’asseyait. Au final, tout le monde a remarqué que derrière la photo, il n'y avait que du vent», souffle-t-il.
Les souffrances du FC Schaffhouse ne datent pas de l’hiver dernier. «J’ai entendu qu’avant mon passage, certains joueurs ont été confrontés à des retards de paiement, poursuit-il. D’autres logeant dans des appartements du club ont été priés de s’en aller.»
Garanties jugées suffisantes par la Ligue
Dans ce contexte, comment les Jaune et Noir ont-ils été autorisés à évoluer en Challenge League? Interrogée, la Swiss Football League (SFL) nous a confirmé qu’ils se trouvaient déjà en situation de surendettement au moment de l’octroi de la licence, ce printemps, mais qu’ils avaient fourni des preuves de solvabilité jugées suffisantes. «Il faut mentionner que les contrôles des paiements des salaires et des charges sociales sont effectués chaque mois et que, jusqu’à présent, ils sont conformes au règlement. C’est en général l’indicateur le plus important pour évaluer la situation», précise la SFL.
Résultat: le risque que la saison se termine à neuf équipes en deuxième division est désormais bien réel. Que les supporters schaffhousois en profitent: la réception prestigieuse de Young Boys en Coupe de Suisse, ce mercredi soir (20 heures), pourrait constituer leur dernière occasion de vibrer avant fort longtemps.