Pourquoi Donald Trump remet l'annexion du Groenland sur la table
LE MONDE QUI BOUGE. Le fils ainé de Donald Trump s’est rendu au Groenland mardi, alors que son père réaffirme vouloir prendre le contrôle du territoire.
Une visite privée ultra médiatisée. Des dizaines de journalistes attendaient Donald Trump Junior à sa descente du Boeing familial, à Nuuk. Le fils du 47eme président américain s’est refusé à tout commentaire sur les velléités d’annexion du Groenland formulées par son père. Officiellement, il était venu pour produire du contenu pour un podcast. Mais dans le clan Trump, la frontière entre affaires et politique est souvent floue.
La simple coïncidence parait peu probable quand, dans le même temps, Donald Trump persiste et signe. Il veut s’emparer du vaste territoire arctique, par la force s’il le faut. Il invoque une "nécessité absolue" pour "des raisons de sécurité nationale". Le Groenland c’est trois fois la taille du Texas et 57.000 habitants qui, selon lui, seraient ravis de devenir américains.
"Le Groenland est un endroit incroyable, et ses habitants bénéficieraient énormément du fait d'intégrer notre nation. Nous les protégerons d’un monde extérieur très vicieux. Redonnons au Groenland sa grandeur!".
Ce n’est pas la première fois que Donald Trump prône l’annexion. Il avait fait des déclarations similaires lors de son premier mandat, pour les mêmes raisons qu’aujourd’hui.
Un intérêt stratégique
Le Groenland dispose de vastes ressources en minéraux: uranium, zinc, cuivre, plomb, diamants. Il est également riche en réserves de terres rares, essentielles à la production de voitures électriques et de smartphones.
Pour toutes ces raisons, déjà en 2019, l'éditorialiste conservateur américain Marc Thiessen ne voyait rien d’absurde dans les ambitions de Trump: "En achetant le Groenland, nous aurions le contrôle de ces composants d’importance stratégique. Sur le plan militaire, cela permettrait d'écarter la Chine et la Russie de la zone Arctique où ils y ont installé des bases et des stations de recherche scientifique", écrivait-il.
La région est effectivement très convoitée. Pékin, qui a obtenu le statut d'observateur au Conseil de l'Arctique en 2013, a, quelques années plus tard, introduit le concept de "route de la soie polaire".
Avec la fonte des glaces, c’est une nouvelle route commerciale qui s’ouvre. Cette route dite du "Nord-Est" intéresse également beaucoup Moscou. Le trajet "Shanghai-Rotterdam", via l’Arctique serait plus court de 4000 kilomètres pour les porte-conteneurs si on le compare à l’axe traditionnel passant par le détroit de Malacca et le Canal de Suez.
Truman avant Trump
Donald Trump n'est pas le premier dirigeant américain à vouloir acquérir le Groenland. Avant lui, en 1946, il y a eu le démocrate Harry Truman. Selon des documents classifiés, les États-Unis offraient alors au Danemark d’échanger des terres situées en Alaska contre les parties du Groenland.
Washington ambitionnait de construire des bases militaires permettant de contrer d’éventuelles attaques de bombardiers soviétiques. Depuis 1951, le Groenland abrite une importante base américaine, la base aérienne de Thulé, située à environ 1.200 kilomètres au-dessus du cercle polaire arctique.
Et cela semble être bien assez pour les autorités locales. "Nous ne sommes pas à vendre", répondent-elle aujourd’hui à Donald Trump. Dans ses vœux pour la nouvelle année, le Premier ministre du Groenland a dit vouloir libérer le pays des "chaînes du colonialisme". Certains y voient un referendum d’autodétermination à venir.
Caroline Loyer